Au niveau européen, qui dit nouvelle Commission, dit nouvelles politiques. Avec la mise en place de la Commission Von Der Leyen après les élections européennes de 2019, ont été annoncés de nouveaux projets visant à réformer l’Europe à plusieurs niveaux. Parmi eux, la lutte contre le réchauffement climatique semble depuis la fin de l’année 2019 prendre du poids dans la politique européenne, avec la mise en place progressive du Green Deal, ou Pacte Vert pour l’Europe. 

    Lorsque la Commission, organe exécutif de l’Union européenne, change de main, ses objectifs sont particulièrement attendus par tous les Etats membres. Ursula Van der Leyen, femme politique allemande issue du camp des chrétiens-démocrates et élue mi-juillet 2019 comme présidente de la Commission, avait fait la promesse de campagne de développer un « Green Deal » européen. Cette promesse est désormais en passe de se concrétiser. Le pacte vert pour l’Europe a été exposé dès novembre 2019 par les membres de la Commission fraichement élue, avec une large majorité. Il a été négocié entre les pays membres de l’UE avec certaines difficultés, ne faisant pas l’unanimité, mais a été adopté par le Parlement, qui quant à lui souhaiterait même aller plus loin pour la sauvegarde de l’environnement.

  • En quoi consiste le Green Deal européen ? 

    Comme son nom l’indique, le Green Deal a pour objet de forger une politique environnementale et économique solide, pour faire de l’Union européenne le premier continent neutre en matière d’émissions d’ici 2050. Un objectif ambitieux, mais louable, si l’on compare notamment les volontés des grandes puissances mondiales en matière d’environnement. Elles sont quasi nulles, puisque la Chine ne souhaite pas particulièrement développer une politique environnementale dans les prochaines années, cherchant à maintenir une croissance forte, alors qu’elle risque de décliner peu à peu. Les Etats-Unis ont quant à eux montré de mauvais signaux pour la sauvegarde de la planète, Donald Trump s’étant retiré des accords de Paris signés en 2016.

    Ainsi, Van der Leyen a souhaité placer l’UE en fer de lance de la politique environnementale mondiale ; elle semble avoir fait de ce pan de sa politique la véritable marque de fabrique de son mandat. « C’est le moment où l’Union européenne va marcher sur la Lune » a-t-elle déclaré en présentant le Green Deal. Selon elle, ce plan pour l’environnement sera la nouvelle source de croissance du continent.

    Le Green Deal européen présente plusieurs volets. Il doit s’attaquer tout d’abord au domaine de l’énergie, pour laisser plus de place aux énergies renouvelables dans le mix européen, sachant qu’aujourd’hui, les énergies fossiles dégagent 75% des gaz à effet de serre de l’UE. Le deuxième volet majeur du Green Deal concerne le secteur du bâtiment, et le troisième celui de l’industrie, notamment avec la volonté d’augmenter la quantité de matériaux recyclés : seulement 12% des déchets sont actuellement recyclés sur tout le continent. Enfin, le Pacte Vert pour l’Europe a pour but de se pencher sur les mobilités, cherchant à développer les transports intelligents et plus écologiques dans l’ensemble de l’Union : les transports sont responsables de 25% des émissions à l’heure actuelle.

  • Concrètement, quels financements pour l’environnement ?  

    La question du financement du Green Deal est cruciale pour le bon développement de cette politique dans les prochaines années, jusqu’à atteindre la fameuse neutralité carbone en 2050. La Commission européenne a déclaré que ce seront environ 1000 milliards d’euros consacrés à la mise en place d’une économie respectueuse de l’environnement à horizon 2030. Une somme faramineuse à l’échelle européenne, dont nombre de détracteurs pensent qu’elle ne sera pas récoltée.

    Ce budget doit être réuni par plusieurs acteurs. Environ 400 milliards d’euros viendront des fonds de l’Union européenne ; 300 milliards seront issus de la contribution directe des Etats membres au Green Deal. Enfin, le reste sera dégoté chez des investisseurs privés, promet la Commission. Un projet qui peut sembler utopique pour certains, mais auxquels les institutions européennes sont prêtes à croire : le Parlement européen a massivement approuvé le Green Deal, précisant même qu’il aimerait que l’Union européenne aille encore plus loin en matière environnementale, il a voté en novembre dernier « l’urgence climatique » pour le Vieux continent.

    Le financement d’un tel projet à l’échelle européenne pose également la question de la place des Etats dans cette politique future. Après négociations, tous les Etats membres ont approuvé le New Deal, à l’exception de la Pologne, qui a souhaité se retirer du projet (opt-out). Par ailleurs, la République Tchèque et la Hongrie sont opposées elles aussi à nombre des aspects du Green Deal et ne souhaitent pas particulièrement investir de leur budget propre dans les prochaines années. La Banque Européenne d’Investissement, un organe de développement de l’UE, a elle aussi annoncé qu’elle lancerait un vaste plan d’investissement pour le Green Deal, atteignant également jusqu’à 1000 milliards d’euros venus d’acteurs privés comme publics.

  • Quelques aspects concrets déjà dévoilés 

    Le Green Deal vise globalement à débloquer des fonds afin de favoriser la transition écologique des quatre secteurs évoqués précédemment, mais aussi pour aider les entreprises à se mettre au vert. La lutte contre le changement climatique fera désormais partie intégrante des critères d’attribution des aides aux territoires et aux acteurs de l’Union européenne. La Commission a choisi de mettre en place un mécanisme de transition équitable, qui reste à préciser, mais qui servira à la transition écologique des régions qui sont particulièrement dépendantes des émissions de carbone en Europe.

    Pourront ensuite être mises en place avec le Green Deal différentes réformes : des taxes carbones pour les pays ne respectant pas leurs engagements en matière d’environnement, un plan d’économie circulaire global, des actions spécifiques de la politique agricole commune pour une alimentation plus durable et de meilleure qualité pour les Européens, ainsi qu’une stratégie pour la sauvegarde des forêts du territoire et un plan de reforestation.

    En somme, le Green Deal est une politique nouvelle et très ambitieuse qu’ont approuvée les institutions européennes ainsi que la quasi-totalité des Etats membres. Il reste à savoir si le budget prévu sera atteint durant les prochaines années, avec un déblocage de 100 milliards d’euros par an à cet effet. Le Brexit, effectif depuis le 31 janvier 2020, a pu effrayer les prévisions de l’UE pour le financement du Green Deal, le Royaume-Uni étant un des plus importants contributeurs au budget européen et à la Banque européenne d’Investissement. Mais cette dernière a affirmé que la sortie des Britanniques n’affectera pas l’efficacité du Green Deal sur l’économie. Les Européens, Commission en tête, croisent les doigts.

Joséphine Boone